Certains sujets de concours peuvent être surprenants. En reprenant des locutions connues, ils invitent à les réactualiser – à l’image de ce sujet : Monsieur Tout-le-Monde. Dans cet article, nous allons évoquer différentes pistes de réflexion, en commençant par l’analyse des éléments clés du sujet.
Peut-on questionner le fait qu’il y ait un Monsieur Tout-le-Monde ?
C’est en tout cas ce qu’incite à faire le sujet. Si Monsieur Tout-le-Monde existait sans aucun doute, il n’y aurait aucune raison de poser ce sujet. Il faut donc comprendre le sujet comme une question : l’existence de Monsieur Tout-le-Monde est-elle un mirage ? Et la réponse sera d’abord oui, sans quoi le sujet n’aurait pas à se poser.
Précisons même la question.
Car, le sujet n’est pas « Monsieur Tout-le-Monde ? ». Le sujet pose déjà le présupposé qu’il existe, ce Monsieur Tout-le-Monde. La question qui se pose réellement, ici, est la suivante : qui est Monsieur Tout-le-Monde ? Est-il vraiment Tout-le-Monde, ou n’est-ce qu’un idéal-type qui en voulant représenter tout le monde, n’incarne finalement personne ? Monsieur Tout-le-Monde, est-ce Monsieur Personne, ou est-ce réellement une personne, avec toute la dignité que cela impose ? N’y a t-il pas une forme de mimétisme social qui pousse l’homme à vouloir ressembler à Monsieur Tout-le-Monde pour ne pas être marginalisé en société ? Mais être comme tout le monde, n’est-ce pas être personne ?
Mais doit-on alors prendre l’expression dans sa compréhension littérale ?
Monsieur Tout-le-monde signifie bien « n’importe qui, une personne quelconque ». Donc, on peut imaginer que ce serait l’idéal-type évoqué ci-avant. Toutefois, il y a une connotation de banalité, voire de rabaissement, dans l’expression « Monsieur Tout-le-Monde » qu’il faudra donc analyser. La normalité est-elle médiocre ?
Monsieur Tout-le-Monde, c’est en effet :
- Autant, Pierre, Paul, Jacques,
- Que ça n’est, Tartempion
- Autant Monsieur X
- Que cet homme dans la rue qui ressemble à tous les autres que l’on ne connaît pas
L’image de Monsieur Tout-le-Monde semble objective, mais admet toutefois une part de subjectivité. Quel rapport entretenir avec Monsieur Tout-le-Monde. Monsieur Tout-le-Monde fait à la fois l’objet d’une représentation et est sujet à comparaison. La question qui se pose alors est donc : à quoi sert l’archétype de Monsieur Tout-le-Monde ? Veut-on le fréquenter ? Apporte-t-il quelque chose à la société ?
Autres analyses du sujet
« Monsieur » Tout-le-Monde n’est pas « Madame » Tout-le-Monde (qui, serait la symétrie féminine de M. Tout-le-Monde, autant Madame Unetelle que Madame Michu). D’où l’idée de se questionner sur l’intention de celui ou celle qui omet de préciser le « et Madame » dans l’expression « Monsieur et Madame Tout-Monde ». Est-ce qu’il ou elle se conforme juste au « masculin qui l’emporte » de l’Académie Française ? Est-ce donc par facilité ou idéologiquement intentionnel ? L’expression « Monsieur Tout-le-Monde » est-elle en effet complète sans Madame ? Quid de « Mademoiselle Tout-le-Monde » ?
Toute expression genrée doit faire l’objet d’une étude des tenants et aboutissants de ce choix langagier. On peut même se demander si la non-binarité est incluse dans l’expression Monsieur Tout-le-Monde, ce qui permet de se questionner sur la relation entre « normalité »/ typicité et majorité ! En psychologie sociale, on pourra ainsi penser à l’idée que si la minorité influence la majorité, c’est la majorité qui crée la minorité, par définition.
Finalement, on en revient à la question liminaire. Qui est Monsieur Tout-le-Monde ? Est-il vraiment, paradoxalement, Tout-le-Monde, ou n’est-ce qu’un idéal-type qui en voulant représenter tout le monde, n’incarne finalement personne ?
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