[Sujet corrigé] Les profits d’aujourd’hui font-ils les investissements de demain ?

par | 5 Mar 2024 | Economie, sociologie et histoire

sujet corrigé, esh, économie

Cet article n’est pas une correction officielle mais bien un outil pédagogique pour vous, vous permettant de cibler les grands éléments à inclure dans votre dissertation et identifier les éléments qui vous manquaient. Il s’agit donc d’un support de correction possible parmi tant d’autres. Voici donc une correction type sur le sujet suivant : « Les profits d’aujourd’hui font-ils les investissements de demain ? ».

I) Introduction type sur le sujet

« Les profits d’aujourd’hui sont les investissements de demain et les emplois d’après-demain ». Ce slogan politique utilisé pour la première par le Chancelier Ouest-allemand H.Schmidt en 1974. Il entend à cette époque promouvoir une politique d’offre d’inspiration néoclassique visant à préserver les marges bénéficiaires des entreprises quelle que soit la conjoncture. Il s’inscrit en porte-à-faux avec le courant néo-keynésien dominant de cette époque qui estime que le niveau d’investissement dépend de la Demande anticipée donc d’un niveau d’emploi suffisant et non du taux de profit des entreprises.

L’investissement fait l’objet d’intenses débat parce qu’elle est une variable clé du capitalisme. Il est un flux venant grossir un stock, celui du capital fixe calculé ex-post et accumulé par l’ensemble des agents d’une économie, Entreprises et État surtout. L’investissement est à la base du capitalisme puisque ce système de production repose sur l’accumulation de capital (soit l’investissement) par des acteurs privés à partir de leurs fonds propres. Ces fonds propres sont pour une entreprise le revenu net (différences moins dépenses) aussi appelé le profit, qui a une influence certaine sur l’investissement puisqu’en 2018, 60% de la formation brute de capital fixe (FBCF, investissement) est due aux entreprises.

Questionner le lien de causalité entre profits et investissement revient à traiter de l’efficacité respective des entreprises et de l’État dans l’investissement productif, de l’intérêt des politiques d’Offre et de l’influence des institutions de marché et de la gouvernance d’entreprise dans la décision d’investissement.

Dans quelle mesure les marges des entreprises (non-financières) peuvent-elles entretenir l’investissement productif ?

II) Développement

1) Le taux de marge des entreprises réel : la condition sine qua non d’une accumulation capitalistique efficace

A) Le profit attendu d’un investissement fonde la décision d’investir

KARL MARX dans Le Capital (1868) explique que le capitaliste lie étroitement son choix d’investissement à la quantité de profit qu’il peut extraire de la mise au travail du prolétariat avec les machines qu’il a déjà accumulées. Même si les conclusions de MARX vont à l’encontre d’une défense de la hausse du taux de profit, on peut estimer qu’il est nécessaire de favoriser par des politiques d’offres la rentabilité du capital investi dans une économie donnée, afin de favoriser l’investissement.

Concrètement, des politiques d’offres guidées par la recherche d’une hausse du taux de profit des entreprises ont rencontré de bons résultats.

Exemple : L’Allemagne au début des années 2000 connaît une baisse du coût du travail suite aux lois Hartz qui certes paupérisent des travailleurs mais permettent à l’Allemagne de maintenir un puissant secteur industriel (grands groupes + Mittelstand, un tissu de PME industrielles) car les entreprises ont dégagé assez de profits pour réinvestir dans le tissu productif et maintenir la compétitivité.

B) L’investissement privé motivé par le rendement du capital est le seul à même d’être efficace

En effet il ne s’agit pas d’augmenter les profits pour augmenter indéfiniment l’investissement, mais de créer les conditions d’offres idéales pour que les entreprises atteignent un niveau d’investissement optimal.

HAYEK dans les Chemins de la servitude (1931) estime que la décision d’investir décorrélée du calcul de la profitabilité entraine un gaspillage de ressources. Si l’État par une politique monétaire expansionniste baisse le taux d’intérêt, les agents sont incités à investir dans des projets qui ne sont pas forcément rentables et qui ne font pas l’objet d’une demande supplémentaire. Ces investissements ne sont donc pas motivés par un véritable potentiel de rendement. En s’appuyant sur la théorie autrichienne, F. HAYEK parle donc d’un « détour de production ».  Ces mécanismes désignent une allocation plus orientée vers les biens de production que vers les biens de consommation, entrainant ainsi une augmentation capitalistique et un surinvestissement.

2) Cette relation causale, même vérifiée, n’exclut pas l’importance d’autres facteurs dans le niveau d’investissement

A) Il existe d’autres moyens d’augmenter la profitabilité de l’investissement que l’augmentation du taux de profit

La profitabilité et le niveau de profit ne recoupent pas les mêmes concepts. Au fond ce qui compte dans la décision d’investir est le cumul actualisé des flux de trésorerie liés à un investissement rapporté à ce capital investit (coût initial). Une augmentation des profits attendu augmente la profitabilité seulement si cela se fait sans augmenter la quantité de capital investi.

L’effet de levier :  l’endettement est aussi une alternative au financement sur fonds propres. Si le capitaliste recourt à du crédit dont le coût (taux d’intérêt) est inférieur au taux de croissance (rentabilité économique), s’endetter s’avère plus rentable qu’augmenter son apport de fond propres (donc augmenter les profits).

Exemple : durant les 30 Glorieuses, part des profits dans la Valeur Ajoutée relativement faible mais profitabilité du capital investit élevé par utilisation de l’effet de levier. Investissement élevé sur cette période.

B) L’action de l’État dans le développement de capital décuple l’action de l’investissement classique par les profits

Le concept de croissance endogène est développé par ROMER en 1986, LUCAS en 1988 et BARRO en 1990. Ces économistes néo-libéraux ne réfutent pas le rôle central d’une politique de hausse des profits afin d’élever l’investissement. Cependant ils reconnaissent la nécessité d’une action complémentaire de l’État pour favoriser l’accumulation de capital humain (écoles publiques, universités de recherche fondamentales…) technique et technologique. Néanmoins ces théories reviennent concrètement à justifier une taxation certaine des entreprises afin de financer cet investissement public, ce qui revient à rogner sur … le taux de profit.

3) La remise en cause du lien systématique entre profits et investissements, et la modification nécessaire des politiques d’offre

A) Des politiques d’offres aux effets neutres sur l’investissement…

La hausse du taux de profit dans le capitalisme anglo-saxon n’a pas augmenté sensiblement l’investissement productif. Comme le rappelle BRUNO AMABLE dans Capitalismes (2004), compte tenu du mode de gouvernance des sociétés anglo-saxonnes (shareholder principle) le profit a surtout été utilisé pour bonifier le capital existant : rachat d’actions, concentrations d’entreprises, versement de dividendes etc.

B) …Voire contre-productifs

SUMMERS et BLANCHARD (d’inspiration keynésienne) : L’élévation du taux de profit depuis les années 1980 et la hausse de la part du capital dans la valeur ajoutée entraîne une baisse tendancielle de la croissance par deux phénomènes

  • la pression à la baisse des salaires entraîne une baisse de la demande effective qui selon. Keynes est la variable clé de l’investissement. Sans demande finale, moins d’investissement dans des biens de productions.
  • la baisse des salaires réels aux États-Unis et en Europe a conduit à une hausse de l’endettement des ménages afin de maintenir le pouvoir d’achat. Cependant cette dynamique augmente les crises de la dette (exemple : crise de la dette étudiante, des Subprimes) qui entraîne à son tour un affaissement de la croissance potentielle, ce qui amenuise les perspectives d’investissement.

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